Pénurie de médecins spécialistes en Île-de-France : L’URPS médecins lance l’alerte
Paris, le 11 octobre 2019
Depuis plus d’un an, l’URPS médecins libéraux Île-de-France mène un travail de sensibilisation pour alerter le grand public quant aux difficultés d’accès aux soins dans la région. Pour mémoire, l’Île-de-France est aujourd’hui le premier désert médical de France métropolitaine, et souffre d’une pénurie de médecins généralistes dans l’ensemble de ses départements.
L’URPS médecins libéraux Île-de-France publie aujourd’hui une série de données inédites pour quantifier la pénurie de médecins libéraux spécialistes, à l’échelle de la région et des départements. Les résultats sont sans appel : l’Île-de-France compte de moins en moins de médecins libéraux spécialistes et la tendance n’est pas près de s’inverser.
Souvent centrés sur le seul accès aux médecins généralistes de premiers recours, les pouvoirs publics en ont oublié toutes les autres spécialités qui souffrent aujourd’hui de graves déficits et dans certains cas posent de sérieux problèmes de coordination et d’accès aux soins.
Télécharger la synthèse régionale et départementale :
Démographie des médecins spécialistes libéraux en Ile-de-France au 1er juin 2019
> Une baisse générale des effectifs
Les données de l’URPS médecins montrent que la baisse du nombre de médecins libéraux est généralisée, celle-ci n’épargne aucune spécialité et aucun département :
En 8 ans, les spécialités les plus touchées sont :
o la psychiatrie avec une diminution de 30% des effectifs libéraux franciliens ;
o la gynécologie (- 29 %) ;
o la dermatologie (- 25 %) ;
o l’ORL (- 21%) ;
o la rhumatologie (- 21 %).
Ces chutes d’effectifs sont d’autant plus inquiétantes pour l’accès aux soins qu’elles concernent des spécialités où les médecins libéraux sont majoritaires (par rapport aux salariés) : 72 % des
dermatologues franciliens sont des médecins libéraux, 68 % des ORL, 63 % des gynécologues et 58 % des rhumatologues.
– L’ensemble des spécialités est exposé à des baisses d’effectifs : toutes constatent des pertes avec des variations importantes, les moins exposées étant les pneumologues, les radiologues et les
endocrinologues avec des baisses d’effectifs inférieurs à 5 % ;
– En termes de département, la grande couronne est plus affectée par la diminution des médecins libéraux, avec la Seine-et-Marne qui a perdu 40 % de ses dermatologues en 8 ans, ou le Val d’Oise 39 % de ses ORL. Paris et la petite couronne souffrent également et ne suffisent plus à répondre aux besoins. A noter qu’à Paris, 38 % des actes des médecins spécialistes libéraux sont réalisés auprès de patients des 7 autres départements franciliens.
> Un avenir sombre
La pyramide des âges des médecins libéraux spécialistes en exercice est alarmante, laissant présager de nombreux départs à la retraites et une baisse aiguë du nombre de médecins sur le territoire francilien :
– 30 % des spécialistes libéraux en activité en Ile-de-France ont aujourd’hui plus de 65 ans, avec la possibilité pour ces 3 400 médecins de prendre leur retraite à tout moment ;
– La proportion des plus de 65 ans est particulièrement marquée en psychiatrie où 44 % des médecins libéraux en activité en Ile-de-France ont plus de 65 ans, ainsi qu’en gynécologie (37 %), rhumatologie (34 %) et en dermatologie (33 %) ;
– En termes de département, Paris compte la plus forte proportion de plus de 65 ans, qui sont plus de 40 % des effectifs des cardiologues, des psychiatres, des gynécologues et des rhumatologues.
Face à cela, le nombre de médecins formés dans les spécialités reste certainement insuffisant. Pour exemple, la dermatologie avec seulement 15 postes d’internes ouverts par an en Île-de-France. Au rythme actuel des formations en dermatologie, il faudra 30 ans pour retrouver le niveau de 2010.
L’URPS médecins libéraux Île-de-France avance plusieurs explications, sans pour autant pouvoir quantifier l’importance de chacun de ces facteurs :
– Le manque d’anticipation dans le nombre de médecins à former ;
– Le coût financier trop élevé de l’installation en Île-de- France ;
– Le manque d’attractivité de certains de nos territoires ;
– L’absence de lien entre l’exercice libéral et la formation hospitalo-universitaire : seuls quelques lieux de stages ouverts en Île-de-France auprès de médecins libéraux.
> Comment agir ?
L’URPS médecins libéraux Île-de-France propose 6 pistes pour améliorer en urgence l’offre de soins sur le territoire :
– Trouver un statut ou des avantages aux médecins qui acceptent de poursuivre une activité après 65 ans ;
– Mettre en place des équipes de soins spécialisées, pour faciliter la coordination des parcours entre les spécialistes de ville et leurs correspondants généralistes (cf. la loi du 16/07/2019) ;
– Développer les outils numériques, notamment de télé-expertise, et revaloriser sa tarification pour ouvrir à un médecin généraliste de premiers recours un avis de spécialiste sous 48 heures ;
– Modéliser et financer l’assistant médical et la délégation de tâches dans les différentes spécialités qui le permettent notamment les spécialités techniques, dermato, ORL, cardiologie, gastro-entérologie, rhumatologie… ;
– Investir dans l’installation des jeunes spécialistes à partir de l’expression de leurs besoins organisationnels en facilitant notamment leur accès à des locaux aux normes, confortables pour un exercice médical de qualité ;
– Former des médecins, dans nos universités, en nombre suffisant et développer les stages en médecine libérale au cours de la formation.